jeudi 13 février 2014

Tabea Zimmermann a enflammé l’Orchestre de Paris et son ex-directeur musical Christoph Eschenbach

Paris, Salle Pleyel, mercredi 12 février 2014

Tabea Zimmermann. Photo : DR

Pour un unique programme de la saison, l’Orchestre de Paris aura retrouvé cette semaine celui qui fut son directeur musical durant la décennie 2000-2010, dans un programme alliant l’Allemand Johannes Brahms et son disciple tchèque Antonin Dvořák, au hongrois Béla Bartók, dont le seul rapport avec le premier est le recueil de Danses hongroises tandis qu’avec le second l’inspiration plus ou moins puisée dans les musiques traditionnelles de leurs pays respectifs.

Christoph Eschenbach. Photo : DR

Sous la direction de Christoph Eschenbach, Carnaval op. 92, deuxième volet du triptyque d’ouvertures qu’Antonin Dvořák a consacré à la nature, la vie et l’amour sur lequel s’est ouvert le concert n’a rien eu de pragois, tirant plutôt vers la Prusse, le chef allemand négligeant de faire chanter l’orchestre et perdant le sens de la nuance pour se focaliser sur la rythmique, qu’il a rendue pour le moins pesante, et le vertige sonore auquel les musiciens se sont laissés emporter d’enthousiasme joutant en puissance, pour ne jamais aller en deçà du forte.  

Béla Bartók (1883-1945), page autographe du Concerto pour alto et orchestre Sz. 120 (1945). Photo : DR

En revanche, dans le Concerto pour alto et orchestre Sz. 120 de Béla Bartók, Christoph Eschenbach a confirmé combien il sait accompagner, soutenir et dialoguer avec les solistes, qu’ils soient chanteurs ou instrumentistes. Ainsi les pupitres de l’Orchestre de Paris ont-ils pu rivaliser de virtuosité, d’onctuosité, de chatoiement. Certes, l’orchestration de cette partition restée inachevée à la mort de son auteur est assez rudimentaire, et c’est à l’instrument soliste que revient l’essentiel de l’œuvre, sa partie étant d’une intense expressivité et le lyrisme rhapsodique d’une beauté suprême. La musicalité naturelle de Tabea Zimmermann, l’ardente beauté de sa palette de timbres qui exalte des sonorités de braise allant s’épanouissant sous l’archet d’airain de cette magnifique artiste qui glisse avec une légèreté proprement aérienne sur le magnifique alto du luthier français Etienne Vatelot qu’elle joue depuis 1983. En bis, l’altiste allemande a donné un époustouflant mouvement initial de la Suite n° 1 pour alto en sol mineur op. 131d de Max Reger, première œuvre directement écrite pour cet instrument seul de l’histoire de la musique, quelques années avant les Sonates de Paul Hindemith. Le jeu vif-argent de Tabea Zimmermann a instillé à cette page un tour enchanteur, la musicienne se jouant des passages en doubles cordes et des grands traits d’archet avec une aisance confondante.

Johannes Brahms (1833-1897). Photo : Bettmann/Corbis, DR

L’on a pu craindre un long moment pour la Symphonie n° 4 en mi mineur op. 98 de Johannes Brahms, qui s’est ouverte sur un mouvement initial d’une lenteur suffocante, d’une opacité asphyxiante, d’une noirceur funèbre. Défaite de sa lumière et de sa sensualité, l’œuvre a risqué s’éterniser dans l’emphase, l’Orchestre de Paris étouffant littéralement au point que l’on ne pouvait plus distinguer la polyphonie des voies de l’écriture fluide de Brahms, dont les longues phrases extraordinaires de beauté s’éternisaient à l’envi, les coups d’archet traînant de façon trop appuyée sur les cordes, sans souplesse. L’Andante moderato s’est avéré plus chantant et moins affecté, mais sans la générosité et l’humanité que ces pages contiennent en vérité, tout en laissant enfin filtrer quelques rais de lumière. Ce n’est que sur l’Allegro giocoso que l’œuvre a commencé à respirer vraiment pour s’épanouir dans le finale, vif et emporté, mais sans l’énergie jubilatoire que savaient y instiller un Claudio Abbado, un Herbert von Karajan, un Michael Gielen, voire un Neeme Järvi, le père de l’actuel directeur musical de l’Orchestre de Paris.

Bruno Serrou 

2 commentaires:

  1. Theatre d'opera et de ballet et de choregraphes, Frans

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    1. Metier merveilleux musiciens Francais et les penetrant enterpretation d'une chanson delicieux.

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