mercredi 5 juin 2013

CD : Marie Vermeulin interprète Préludes, Regards & Esquisses d’Olivier Messiaen


Lauréate du Concours Messiaen 2007, Marie Vermeulin est à 29 ans une rayonnante musicienne douée d’une riche personnalité. Passionnée de musique de son temps, elle excelle autant dans Messiaen que dans Boulez, comme j’ai pu le constater à La Grave en 2010 durant le Festival Messiaen au Pays de la Meije. Bien qu’elle n’ait personnellement connu ni Olivier Messiaen ni son épouse, Yvonne Loriod, Marie Vermeulin entretient une intimité musicale singulière avec l’œuvre du compositeur qu’elle a travaillée au Conservatoire de Paris avec l’un des plus proches disciples du Maître, le pianiste Roger Muraro, tout en se perfectionnant à Florence auprès de Lazar Berman, éminent lisztien.

Après deux premiers disques consacrés à la musique de chambre de Messiaen, l’un de mélodies, avec Nathalie Manfrino, l’autre de violon et piano, avec Daniel Hope (1), Marie Vermeulin présente son premier enregistrement soliste. C’est en la petite église à l’acoustique somptueuse de clarté et de présence de La Grave, au pied du sommet de La Meije, qu’elle a choisi de le réaliser. Au sein de l’impressionnant catalogue pianistique de Messiaen, elle a sélectionné des œuvres couvrant les trois grandes époques de la création du compositeur, depuis les Huit Préludes de 1928-1929 signés d’un Messiaen de vingt ans, jusqu’aux Six Petites Esquisses d’Oiseaux conçues entre 1985 et 1987, en passant par deux des Vingt Regards sur l’Enfant Jésus, les cinquième et dixième, de 1944. Les premières pages sont placées sous l’influence de Debussy, tandis que les suivantes, sous le signe du mystère divin dont Messiaen fut l’un des grands chantres du XXe siècle, sont un jaillissement permanent de rythmes et de résonances, alors que les troisièmes présentent un festival de couleurs et d’exotisme dans lequel le compositeur célèbre à la fois les volatiles et sa seconde compagne qui l’ont inspiré sa vie durant.

Douée d’un nuancier d’une diversité peu ordinaire, capable de colorisations infinies, Marie Vermeulin met subtilement en relief l’impressionnisme des Préludes par son toucher arachnéen, tandis qu’elle met somptueusement en exergue le lyrisme et la spiritualité véhémente du Regard du Fils sur le Fils et du Regard de l’Esprit de Joie. Du second de ces Regards, elle magnifie la grande diversité de couleurs et de timbres suscitée par l’écriture de Messiaen qui n’est pas sans évoquer Franz Liszt. La musicalité à fleur de peau et la palette sonore d’une richesse inouïe de la jeune pianiste exaltent les rutilances harmoniques des Six Petites Esquisses d’Oiseaux, dont Marie Vermeulin fait de véritables saynètes ornithologiques en donnant vie à tout un monde magique qui, sous ses doigts ensorceleurs, prend véritablement chair. Ce qui émane de ce disque est des grands artistes dont Marie de Vermeulin possède indubitablement toutes les vertus.

Bruno Serrou

1 CD Paraty 612118 (distribution Codaex). Durée : 64mn17s.

1) 2 CD Universal Classics

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